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Le tibet musical et humain
Ani Choying Drolma
Cest une jeune nonne tibétaine mais aussi une star internationale de la musique. Femme engagée, elle veut enseigner la liberté aux petites filles népalaises.
On lui a rasé la tête. Elle avait 13 ans. Ses longues mèches brunes sont tombées sur le sol. Elle était heureuse. Cest elle qui avait décidé de devenir nonne parce quelle refusait lidée de se marier. Autour delle, toutes les femmes et, parmi elles, sa mère, passaient leur vie à obéir aux moindres ordres de leur mari, à lui servir ses repas et à remplir sa tasse de thé. Elle ne voulait pas de ce sort. Pour une petite fille tibétaine dont les parents avaient fui au Népal, lavenir noffrait pas dautre alternative : ou elle se mariait, ou elle devenait nonne. Lenfant était rebelle. Mais rebelle avec une cause. Elle voulait être une femme libre mais aussi exercer ce quen terre bouddhiste on appelle la compassion. Cest-à-dire aider les autres. Les femmes surtout. Aujourdhui, Ani Chöying Drolma cest le nom quelle porte depuis quelle a prononcé ses voeux a 36 ans et sa détermination demeure intacte. Sa vie est un combat et elle se bat dabord pour les nonnes tibétaines qui, souvent, demeurent analphabètes et vivent dans des conditions misérables, alors que les jeunes moines peuvent accéder à lenseignement supérieur bouddhiste. « Les nonnes doivent entrer, elles aussi, dans le XXIe siècle », martèle Ani Chöying et elle donne lexemple en conduisant son 4 x 4 elle est la seule nonne du Népal à avoir son permis de conduire et en utilisant un téléphone portable. Un téléphone qui ne cesse de sonner. Car elle est devenue une star qui donne des concerts en Amérique et en Europe. Y accourent Tina Turner et Bonnie Raitt, qui avouent être ses fans. Ani Chöying Drolma a, en effet, une voix magique que les djs du Bouddha Bar, à Paris, ont vite remarquée : ses chants figurent dans leurs compils. Ce timbre si pur, un musicien américain la découvert alors quil visitait le monastère où elle chantait des mantras. Cétait en 1997. Il lui a fait enregistrer un album. Le succès commençait.
Aujourdhui, au Népal, tout le monde la reconnaît dans la rue. Des touristes allemandes, qui possèdent tous ses cds, sémerveillent de la croiser. Sa notoriété ne flatte pourtant pas son ego. « Je ne chante pas pour devenir célèbre ou riche. Je chante uniquement pour servir la cause des femmes et celle de leur éducation », affirme-t-elle. La star est vêtue, en cet hiver himalayen, de sa seule robe de nonne sur laquelle elle a passé un mince blouson de coton. Ani Chöying Drolma appartient à la deuxième génération des réfugiés tibétains, celle qui demeure fortement attachée à sa culture tout en cherchant à souvrir sur la modernité. Ses parents ont quitté le Tibet peu avant que la Chine ny déchaîne sa révolution culturelle. Ils pressentaient ce qui allait arriver : des adolescents vêtus de luniforme Mao ont obligé les Tibétains à leur remettre leurs moulins à prières, leurs images sacrées. Puis ils ont jeté ces symboles dune religion deux fois millénaire au bûcher. Des moines ont été exécutés parce quils refusaient de quitter leur robe. Par milliers, les Tibétains ont fui en traversant lHimalaya, le plus souvent à pied. La première grande étape de leur exode était Katmandou, capitale du Népal. Tous faisaient une longue halte au sanctuaire de Boudhanath où, depuis la nuit des temps, les voyageurs tibétains remerciaient Bouddha de leur avoir permis de traverser la montagne la plus redoutable du monde. Beaucoup sont restés. Ce qui nétait, avant 1959, quun antique temple au milieu de champs, à 7 kilomètres de Katmandou, est aujourdhui une ville. Cest là que les parents dAni Chöying se sont installés.
Cest là quelle est née et a grandi. Le père dAni Chöying était sculpteur dimages religieuses. « Nous appartenions à la classe moyenne, remarque-t-elle. Ce qui signifie que nous mangions à notre faim. Mais cétait tout. Nous ne possédions rien dautre. » Elle na jamais eu de jouets. Ses poupées étaient ses deux petits frères, dont elle avait la charge. Parce quelle était une fille, elle a, très jeune, assumé une partie des tâches domestiques de la famille. Pour y échapper, elle se rendait au temple tout proche qui, avec ses moulins à prières, ses cloches et ses drapeaux, devenait son terrain de jeux. Elle nest allée à lécole que jusquà léquivalent du CM2, alors quelle brûlait de lenvie dapprendre. Quand elle a exprimé le désir de devenir nonne, son père a refusé. Il avait besoin delle à la maison. Il lui a fallu quatre ans, et lappui de sa mère, pour enfin obtenir lautorisation de prononcer ses voeux.Annick Le FlocHmoan , le 26 Février 2007<script src='http://www.kazeo.com/inclusion/afficher_fichier.php?urlfichier=D:\Images poême\Ani Choying Drolma 1.avi@@@500@@@450'></script>
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